Au XVème siècle.

Gérard Noirfalise a remarquablement reconstitué dans une aquarelle ce que pouvait être le village de Saint-Symphorien au XVème siècle. L’occasion de nous y plonger.

Il n’est pas inutile d’élargir notre vision et de replacer la vie de notre village dans son contexte historique du XVème siècle.

Le terme « Renaissance » qu’on applique traditionnellement aux XVème et XVIème siècles est trop étroit pour définir dans toute sa vigueur la grande révolution qui se situe à cette époque.

Aux XVème et XVIème siècles naît le Monde Moderne. Les découvertes géographiques ne renversent pas l’évolution économique ; le stade de l’économie urbaine était déjà dépassé avant elles. Mais elles accélèrent et amplifient le mouvement.

Les succès de la Réforme (Luther et Calvin) ne peuvent être séparés du contexte social et économique. L’industrialisation croissante et les progrès du capitalisme avaient provoqué l’apparition d’un prolétariat qui voit dans les doctrines nouvelles l’unique issue à sa misère. C’est peut-être là que réside la différence essentielle entre les hérésies du Moyen-Age et le protestantisme.

Au Moyen-Age, quelques clercs avaient toujours conservé de l’intérêt pour l’antiquité. Au XVème siècle, cet intérêt s’infiltre dans des milieux plus larges. Il leur apporte la révélation d’un nouveau type d’homme, qui n’est pas simplement copié des Grecs ou des Romains, mais qui tend à s’émanciper de l’esprit médiéval et de sa ferveur chrétienne.

En même temps, le Monde Moderne découvre l’Etat. Le droit romain, l’esprit de centralisation et les aspirations à l’hégémonie avaient agi dès les XIIème et XIIIème siècle, et dès cette époque, les puissances temporelles s’étaient servies de la religion à des fins politiques. Mais aux XVème et XVIème siècles, l’esprit est autre. Le souverain, qui n’est plus bridé par des principes féodaux ou théologiques, est reconnu comme source de droit. On identifie sa personne avec l’Etat, et ses rêves de domination, qu’un système d’alliance doit aider à réaliser, n’ont plus en vue le bien commun de ses sujets mais la grandeur de l’Etat.

L’emploi généralisé de l’artillerie obligea les villes à édifier des remparts plus solides et les châteaux à renforcer leurs défenses. Les multiples conflits du XVIème siècle entraînèrent de nombreuses destructions. Le château perdit progressivement sa fonction militaire ; celle-ci fut limitée à une action plus symbolique que réelle.

Dans le village de Saint-Symphorien, la vie paraît plus calme. La seigneurie du village est aux mains de la famille GHELET dont un des membres, Jean, sera échevin à Mons en 1437, 1450, 1452 à 1456 et chef échevin en 1457, 1459, 1463 à 1466, 1468 à 1472. Jean Ghelet meurt en 1481 et est enterré en l’église Saint-Nicolas à Mons (source cercle Heraldus de Mons).

Au point de vue relidieux, l’Ordre de Malte dont « l’hospital » càd le siège où, originairement, les fidèles de retour des croisades étaient accueillis, est établi dans le village à l’emplacement de ce qui deviendra au XVIIIème siècle la cense de l’Ordre. Voyez la rubrique à ce propos et constatez l’emplacement des bâtiments de l’Ordre sur l’évocation de Gérard Noirfalise et le plan cadastral ci-dessous. Le combat d’influence entre l’Ordre et l’abbaye d’Epinlieu fait rage. De nombreux litiges seront tranchés par la Cour du Hainaut. 

Comme nous l’avons vu dans l’introduction historique, le droit (romain) prend une place décisive dans les rapports entre les individus et « les institutions » (ordres religieux, seigneurs locaux voire institutions entre elles et particuliers entre eux). Les archives de l’Etat à Mons possèdent de nombreux écrits attestant des litiges tranchés à cette époque et d’actes juridiques conclus.

Pour illustrer notre propos nous mentionnerons : 
– la sentence rendue le 9 novembre 1388 par la Cour de Justice du Hainaut au sujet de coups portés au bailli d’Epinlieu par ordre du Commandeur de l’Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem en Hainaut et Cambresis ;
– jugement rendu le 23 décembre 1461 au château de Mons sur un différend entre l’abbaye d’Epinlieu et Jean GHELET au sujet « du terrage et de la haute justice de Saint-Symphorien » ;
– 1490 : sentence au profit du Commandeur de l’Ordre concernant « l’affermage de la bière à Saint-Symphorien » ;
– 19 mai 1501 : bail à ferme de l’immeuble abritant l’hôpital de Saint-Jean de Jérusalem (Ordre de Malte), maison, colombier et dépendances octoyé, pour 18 ans, à Estiévenne WILLEMART, laboureur demeurant à Saint-Symphorien ;

Le XVIème siècle connaîtra de très nombreux litiges entre les trois « pouvoirs locaux » à savoir l’Ordre de Malte, l’abbaye d’Epinlieu et le seigneur de Saint-Symphorien.

Le triomphe (provisoire) du droit sur la force…

Evocation du village – aquarelle de Gérard Noirfalise.
Plan cadastral dit « primitif » du début du XIXème siècle sur lequel ont été ajoutées des indications que l’on retrouve dans l’évocation ci-dessus.
Construction d’une tour à Avesnes par le seigneur Gossuin d’Oisy.
Scène d’adoubement. La cérémonie de l’adoubement du chevalier c’est-à-dire de la remise de l’équipement militaire, fut considérée comme un rite de passage.

©Texte de Bernard Detry

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